Wednesday, October 30, 2024
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R.F.I : Géopolitique, le débat (29.07.06)

-Le comportement d’Israél relève de la traumatologie -La France est entrée dans une logique de vassalité vis-à-vis de l‘Amérique. -Le…

Par : René Naba - dans : Entretien - le 29 juillet 2006

-Le comportement d’Israél relève de la traumatologie
-La France est entrée dans une logique de vassalité vis-à-vis de l‘Amérique.
-Le Hezbollah vit en cet été 2006 son passage des Thermopyles.
-Le dossier nucléaire iranien est postérieur de cinquante ans au problème palestinien.

Israël. Le comportement d’Israël au Liban relève de la traumatologie dans la mesure où l’Etat hébreu cherche à gommer les plus cuisantes défaites de son histoire militaire qu’il a précisément enregistrées dans ce pays, d’abord, à Beyrouth, en 1982, lors du siège de la capitale libanaise, en 2000, ensuite, lors du retrait forcé de l’armée israélienne du sud-liban.

Beyrouth, qui représente la liberté, la diversité, la mixité et la licence, constitue la négation des valeurs véhiculées par les deux grandes théocraties pro-occidentales du Moyen-Orient: l’Arabie saoudite et Israël, qui n’est démocratique que pour ses propres concitoyens de confession juive.

Son acharnement contre le Liban via sa guerre au Hezbollah et contre la Palestine, via sa guerre au Hamas, vise à éradiquer « l’esprit de résistance dans le monde arabe ». Il est difficile d’imaginer que 280 millions de personnes accepteront de vivre indéfiniment sous la botte israélo-américaine. le choix de la servitude n’est pas inéluctable.

En se retirant du sud-liban, Israël a conservé les outils de nuisance: Il n’ pas communiqué la carte des mines qu’il a implantées dans la zone, empêchant le déminage du secteur frontalier et le retour plein et entier de sa population. Il persiste à maintenir en détention arbitraire près de dix mille prisonniers (arabes, palestiniens, libanais), arbitrairement, sans jugement, depuis plusieurs années, notamment le plus illustre prisonnier libanais Samir Kantar.

La capture des soldats israéliens, déclencheur des hostilités, est la cause immédiate de ce nouveau conflit. Mais les raisons profondes de ce conflit sont à chercher ailleurs. Le problème du dossier nucléaire iranien que l’on présente comme une des raisons masquées de ce conflit, est potérieur de cinquante ans au problème palestinien et c’est dans ce problème là plutôt qu’il faut voir les véritables raisons.

La France et la couverture occidentale du conflit. La France est entrée dans une logique de vassalité vis-à-vis de l’Amérique et la pensée politique occidentale est captive de la stratégie israélo-américaine.

Il est anormalement exorbitant que l’on se réjouisse en France de n’avoir pas condamné Israël pour ses atteintes répétées au Droit Humanitaire International au prétexte de se donner une marge d’intervention diplomatique.

Dominique de Villepin à Beyrouth c’est trop d’images pour combler un vide diplomatique. Quand on songe que le premier ministre s’est contenté d’une visite-éclair de deux heures à la capitale libanaise et d’un coup de fil au patriarche maronite…….comme s’il n’existait pas d’autres autorités opérantes au Liban, …….cela donne une idée du rétrécissement du champ diplomatique de la France

La France, de concert avec Israël, s’est livrée en 1956 à une expédition punitive contre l’Egypte pour punir Nasser d’avoir nationalisé le canal de Suez. Cinquante ans après en 2006, elle préconise des « mesures coercitives » contre le Hezbollah. Les réflexes coloniaux sont tenaces en France.

Il est inique et cynique d’emboîter le pas à Israël en réclamant le respect de la légalité internationale et l’application des résolutions des Nations-Unies, quand l’on songe qu’israel a bafoué toutes les résolutions du Conseil de sécurité, en toute impunité.

Chirac. Jacques Chirac vit une situation cataclysmique : son enfant chéri, politiquement parlant, Rafic Hariri, a été assassiné et son œuvre qui devait passer à la postérité, la reconstruction du centre ville de Beyrouth, a été démolie par le nouveau meilleur allié de la France, le premier ministre israélien Ehud Olmert. Les nouveaux bâtisseurs de Beyrouth ne seront pas forcément les Hariri et Jacques Chirac ne sera plus non plus au pouvoir lorsque le nouveau Beyrouth sera reconstruit……..dans quinze ans.

Il n’y a jamais eu de « politique arabe de la France ». Pour Chirac, celle-ci a consisté a fréquenté les milliardaires arabes, ses meilleurs amis ont été Rafic Hariri et le Roi du Maroc.

Le Hezbollah. Le Hezbollah est la plus importante formation para militaire de la plus importante communauté religieuse au Liban les chiites, qui surpassent de loin numériquement tant les maronites, les chrétiens ou les druzes et les sunnites, malgré le trafic des listes éléctorales.

Le Hezbollah n’a jamais été impliqué dans la guerre civile libanaise. Ses mains ne sont pas souillés du sang des libanais, contrairement aux autres formations. Il n’a jamais cherché chrché à intérférer dans la vie politique libanaise, malgré la place qui pourrait lui revenir soit au titre de la démocratie numérique que de la démocratie patriotique.

Il n’a jamais cherché non plus à infléchir le mode de vie des Libanais. Les boites de nuit les plus luxuriantes de Beyrouth sont à 200 mètres à vol d’oiseau du QG du Hezbollah.

En cet été 2006, le Hezbollah vit son passage des Thermopyles (1) …..pour que s’exerce le droit à l’autodétermination du peuple palestinien et des autres peuples arabes.

Arabie saoudite. Depuis 1969, date de l’incendie de la Mosquée Al-Aqsa à Jérusalem, 3me haut lieu saint de l’Islam, Les Etats-Unis et l’Arabie saoudite ont instrumentalisé l’Islam comme arme de combat, d‘abord contre l’athéisme de l’Union soviétique, ensuite pour briser toute revendication nationaliste arabe.

L’Arabie saoudite, vache nourricière de l’Occident en matière énergétique et meilleur allié arabe des Etats-Unis, n’a jamais réussi à infléchir la position américaine sur le conflit israélo-arabe, malgré deux plans de paix proposés par les rois saoudiens avec la caution des pays arabes, le plan Fahd, en 1982, et le Plan Abdallah, en 2002. Une défaillance du pouvoir crée un vide toujours comblé par ceux qui ont la direction des opérations sur le terrain. C’est une loi quasi biologique.

L’Arabie saoudite redoute la création d’un axe chiite du golfe à la Méditerranée. Mais c’est bien les grands pays arabes sunnites l’Arabie saoudite, l’Egypte et la Jordanie) qui ont aidé à demolir le pouvoir sunnite en Irak (Saddam Hussein) ouvrant la voie à la montée en puissance des Chiites.

L’Arabie saoudite et la Jordanie ont servi de base de départ à l’invasion américaine de l’Oran et à son occupation. L’Amérique et ses alliés arabes cherchent maintenant à compenser au Liban, via le renflouage du sunnite Hariri, la perte de l’influence sunnite à Bagdad .

Pour qu’une chance de paix survienne au Moyen-Orient, il conviendrait de prendre en compte les aspirations légitimes de tous les pays de la région et non d’imposer de force une paix dictée par l’axe israélo-américain.

Note

(1) le défilé des Thermopyles est situé près de la cote sud du Golfe de Maliaque, en Grèce. Il est surtout célèbre par le sacrifice des 300 soldats spartiates (en l’an 480 avant JC) qui se sont fait décimer sur place pour entraver la progression de l’invasion étrangère et permettre à la Grèce d’organiser sa défense et de repousser les envahisseurs. L’apostrophe des défenseurs spartiates est passée à la postérité comme le symbole de l’esprit d’audace et de l’esprit de sacrifice : «Passant va dire à Sparte, qu’ici 300 des siens sont morts pour que vive la liberté ».