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Israël-Iran: La Guerre asymétrique 1/4

Paris – Le délai de latence observé par les Etats-Unis à l’égard de l’Iran, en raison de la campagne présidentielle…

Par : René Naba - dans : Analyse Iran Israël - le 5 janvier 2013

Paris – Le délai de latence observé par les Etats-Unis à l’égard de l’Iran, en raison de la campagne présidentielle américaine et de la vacance du pouvoir en Arabie saoudite pour cause de maladie du Roi et de son ministre des Affaires étrangères, Saoud Al Faysal, prend fin avec la reconduction du mandat de Barack Obama et son discours sur l’Etat de l’Union le 21 janvier 2013, déblayant ainsi la voie à une possible épreuve de force entre le duo israélo américain et la République islamique iranienne.
Papier co-publié avec Golias Magazine numéros de Janvier 20132 et Février 2013.

La première confrontation entre l’Etat hébreu et un état musulman non arabe.

Une guerre entre Israël et l’Iran constituerait la première confrontation entre l’Etat hébreu et un pays non arabe, depuis l’auto proclamation de son indépendance, en 1948, il y a 64 ans.

Premier conflit armé entre Israël et un état musulman non arabe, la guerre Israël-Iran tendrait à étendre les hostilités vers la zone inflammable des pétromonarchies du golfe arabo persique, bien au-delà de la zone traditionnelle du champ de bataille constitué par les pays bordant le bassin historique de la Palestine du mandat britannique (Egypte, Jordanie, Liban, Syrie et Palestine).

Si elle devait avoir lieu, elle traduirait un retournement stratégique de tendance, mettant aux prises, à fronts renversés, les deux anciens alliés de la guerre froide, l’Iran et Israël, et placerait en délicate posture l’Islam atlantiste, les régimes néo-islamistes du «printemps arabes», l’Egypte, La Tunisie et la Libye, de même que la Turquie et leurs alliés pétro monarchiques pro américains, comme en a témoigné la dernière opération israélienne contre Gaza, en novembre 2012.
Dans la période post indépendance des pays arabes, dans la foulée de la fin de la IIme Guerre mondiale (1939-1945), l’Iran impériale et Israël avaient noué, de concert avec la Turquie, deuxième pays musulman non arabe du Moyen Orient, une alliance de revers en vue de prendre en tenaille le Monde arabe et brider ses pulsions nationalistes, particulièrement sur la question palestinienne.

La rupture de l’alliance stratégique israélo-iranienne est intervenue à la chute de la dynastie Pahlévi, en Février 1979, et la signature un mois plus tard du Traité de paix de Washington entre Israël et l’Egypte, le 25 mars 1979, entraînant la neutralisation militaire de l’Egypte et son exfiltration du champ de bataille, parallèlement à la promotion concomitante de l’Iran Khomeyniste au rang de porte étendard de la cause palestinienne.
Un deuxième infléchissement des termes du conflit israélo-arabe est survenu lors de la première guerre du Golfe (1990-1991), qui a constitué la première alliance militaire objective entre Israël, l’Egypte et les pétromonarchies arabes, en superposition à la première guerre Nord-sud par la réalisation de l’Union sacrée des consommateurs de pétrole contre l’un de leurs principaux fournisseurs du sud, en l’occurrence l’Irak de Saddam Hussein. Un exploit financé de surcroît, faut-il le souligner, avec les deniers arabes.

L’accession de l’Iran au rang de «puissance du seuil nucléaire», en dépit d’un embargo de trente ans doublé d’une guerre de près de dix ans imposée à l’Iran par Irak interposé, a suscité l’admiration de larges fractions de l’opinion de l’hémisphère sud, qui ont vu dans cet exploit technologique incontestable la preuve parfaite d’une politique d’indépendance, en ce qu’elle a débouché sur la possibilité pour l’Iran de se doter d’une dissuasion militaire en même temps que de maintenir son rôle de fer de lance de la révolution islamique.
Dans une zone de soumission à l’ordre israélo américain, le cas iranien est devenu de ce fait un cas d’école, une référence en la matière, et, l’Iran, depuis lors, est devenu le point de mire d’Israël, sa bête noire, dans la foulée de la destruction de l’Irak, en 2003.

Le primat d’Israël

Le primat d’Israël conditionne le récit médiatique occidental et obère la crédibilité de sa démarche, en ce qu’elle révèle une distorsion de comportement des pays occidentaux face aux puissances nucléaires. Les Etats-Unis et l´Union européenne contrôlent 90% de l´information de la planète et sur les 300 principales agences de presse, 144 ont leur siège aux Etats-Unis, 80 en Europe et 49 au Japon. Les pays pauvres, où vit 75% de l´humanité, possèdent 30% des médias du monde (1).

Unique puissance nucléaire du Moyen-Orient, Israël a ainsi constamment bénéficié de la coopération active des États occidentaux, membres permanents du Conseil de sécurité (États-Unis, France, Grande-Bretagne), pour se doter de l‘arme atomique, bien que non adhérent au Traité de Non-Prolifération. Il en est de même de l’Inde et du Pakistan, deux puissances nucléaires asiatiques antagonistes, qui bénéficient néanmoins d’une forte coopération nucléaire de la part des États-Unis et de la France en dépit de leur non ratification du traité de non-prolifération nucléaire.

L’argumentaire occidental gagnerait donc en crédit si la même rigueur juridique était observée à l’égard de tous les autres protagonistes du dossier nucléaire, au point que la Chine et la Russie, les principaux alliés de l’Iran, se sont dotées d’une structure de contestation du leadership occidental à travers l’organisation de coopération dite «le groupe de Shanghai», pour en faire une OPEP nucléaire regroupant les anciens chefs de file du camp marxiste (Chine et Russie), ainsi que les Républiques musulmanes d’Asie centrale, avec l’Iran en tant qu’observateur.

L’Iran apparaît ainsi du fait de la pression israélienne, relayée par ses alliés européens notamment la France, comme une épreuve militaire et diplomatique d‘importance. Mais la focalisation du débat sur le nucléaire iranien pourrait contrarier l’approche binaire de la diplomatie américaine, visant la promotion d’un règlement négocié du conflit israélo-palestinien parallèlement à une neutralisation de l’Iran, à défaut d’une normalisation des relations irano américaines, en vue de se dégager du bourbier afghan.

La croisade israélienne contre l’Iran est double: écarter une éventuelle menace iranienne et se soustraire à ses engagements internationaux concernant le règlement de la question palestinienne. Comparable par son intensité à la campagne de mobilisation contre l’Irak, cette offensive militaro médiatique israélienne, en reléguant au second plan le règlement du conflit israélo-palestinien, viserait, d’une manière sous-jacente, à acclimater l’opinion internationale au fait accompli de l’annexion de la Palestine, à l’effet de restaurer le prestige israélien terni par ses échecs répétés tant contre le Liban, en 2006, que contre l’enclave palestinienne de Gaza en 2008-2009 et en 2012.

L’Iran, par effet d’aubaine, a acquis une stature de puissance régionale du fait de la politique erratique des États-Unis tant en Afghanistan qu’en Irak, où ses rivaux idéologiques, les radicaux taliban sunnites et le laïc baasiste irakien Saddam Hussein ont été éliminés par leur ancien protecteur américain. Il entend se faire reconnaître la place qu’il estime sienne dans le concert régional, qui était en fait sienne, dans la décennie 1970, lorsque les Américains avaient confié au Chah d’Iran un rôle de «super gendarme» dans le Golfe, en proie alors à la rébellion communiste du Dhofar (Sultanat d’Oman) et à la contestation nationaliste du «Front de Libération Nationale de la Péninsule Arabique» tant en Arabie saoudite qu’au Yémen que dans les Émirats pétroliers.

Dans cet esprit, l’Iran a réaffirmé son droit inaliénable au nucléaire et proposé une négociation globale avec le groupe de contact portant sur tous les aspects du contentieux qui l’oppose avec les pays occidentaux depuis trente-cinq ans, tant l’embargo qui frappe la République islamique, que les avoirs iraniens bloqués aux Etats-Unis, de l’ordre de plusieurs milliards de dollars, que le rôle régional de l’Iran, la coopération sécuritaire en Irak et en Afghanistan.

Suivra…

Comments


  • J’ai toujours pensé que la politique était quelque chose de très sale… Mais finalement, le départ forcé du Shah a été, dans un premier temps, une bonne chose pour les pays arabes et pour finir, une bombe à retardement ??

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